Nicaragua : Les intérêts des gens au centre des politiques du gouvernement

Nicaragua : Les intérêts des gens au centre des politiques du gouvernement

Résumé d’un article de Joakin Alfonso du 21 mai 2010 Cet article de 6 pages est une réponse à celui de Maria Lopez Vigil sur la situation au Nicaragua paru dans la revue ENVIO et repris dans la REVISTA PUEBLOS (Espagne)

Les analyses comme celles de la revue ENVIO viennent depuis toujours du secteur désenchanté du sandinisme, de personnes qui, quoi que fasse le gouvernement en faveur de la population la plus défavorisée et malgré les changements au sein du FSLN, ne se départent pas leurs idées préconçues tournant autour de la personnalité de Daniel ORTEGA, du pacte conclu avec le parti libéral et des accusations de clientélisme et de corruption. Et, bien sûr, que la politique d’aujourd’hui n’a rien à voir avec la révolution des années 80. Ces analystes n’ont toujours pas dépassé la défaite électorale de 1990 et ils oublient que 17 années de gouvernements néolibéraux ont changé la structure sociale du pays et n’acceptent pas que le contexte au Nicaragua et dans le monde ne soit plus le même 20 ans après.

Dans cet article Maria Lopez Vigil (M.L.V.) mélange des vérités avec des demi vérités et donne surtout une série de clichés qui, à force d’être répétés sans cesse dans les médias d’opposition (la majorité), dans la plupart des ONG et quelques institutions de la société civile européenne, sont considérés comme vrais, même s’ils se fondent sur des rumeurs et n’apportent jamais de preuves….

M.L.V. écrit que les investissements, les « remesas », les exportations, la consommation interne se sont réduits à cause de la crise ce qui est logique et correspond à la vérité. Mais elle oublie de dire que, malgré ce contexte, l’extrême pauvreté a pu être réduite significativement selon la dernière enquête faite dans 7 500 foyers ruraux et urbains. Elle est passée de 35,7% en 2005 à 28,5% en 2009. La FAO elle-même a constaté une amélioration de la sécurité alimentaire grâce aux programmes « Hambre Cero » et « bono de patio » (ce dernier programme consiste notamment à la remise de poules et de semences aux familles vivant à la périphérie des villes) et elle reconnaît les efforts du gouvernement.

On peut ajouter qu’au pire moment de la crise, aucun fonctionnaire n’a été licencié et aucun programme social n’a été suspendu.

Puis M.L.V. revient sur la soi-disante fraude électorale lors des élections municipales de 2008 qui aurait eu comme conséquence la suspension de l’aide des pays européens. Et là, elle commence avec les demis - mensonges puisque l’opposition parlait déjà de la fraude avant les élections et n’a jamais fourni des preuves valables tandis que les observateurs internationaux (accrédités par l’ONU) ont, eux, validé ces élections et les magistrats issus du parti faisant partie du Conseil Electoral n’ont pas mis en question la légalité du processus…. De plus, la suspension de l’aide de certains pays est davantage due à un désaccord politique qui a commencé dès la prise du pouvoir des sandinistes, tandis que d’autres continuent à apporter le soutien au pays. Donc, avant tout, le Nicaragua est confronté à un problème d’ingérence et le résultat des élections n’est qu’un prétexte.

M.L.V. reproche à Daniel Ortega de ne pas avoir fait une réforme fiscale dans la période d’ « état de grâce » qui a suivi immédiatement sa réélection. Elle oublie de dire que, dés le lendemain de sa prise du pouvoir, ce sont notamment les ex-sandinistes qui l’accusèrent d’être un dictateur. En réalité le gouvernement de Daniel Ortega n’a jamais eu d’ « état de grâce » ni de « chèque en blanc ». Il a été obligé de ménager l’oligarchie et la bourgeoisie pour ne pas faire fuir les investisseurs. Mais il est vrai qu’une réforme fiscale demeure nécessaire et qu’elle permettrait de sortir le pays de la pauvreté en réduisant les inégalités.

En ce qui concerne la réélection, elle est effectivement prohibée par la Constitution politique de l’année 1995. On pensait à cette époque que la nouvelle constitution aurait permis la victoire du candidat du MRS (mouvement de rénovation sandiniste opposé au FSLN), Sergio Ramirez, mais celui-ci n’a finalement obtenu que 2% des voix. Avant cette constitution de 1995, la Constitution originale de la Révolution Sandiniste, celle qui était admirée et défendue par des millions de Nicaraguayens et d’internationalistes dans les années 80 permettait la réélection indéfinie pour toutes les charges. À présent, la Cour Suprême de Justice n’a pas décidé que Daniel Ortega ou les 109 maires puissent continuer leurs charges indéfiniment, mais seulement qu’ils puissent faire acte de candidature lors des élections générales de 2011 et des municipales de 2012. C’est au peuple de décider s’il veut les maintenir dans leurs charges ou non.

Finalement, M.L.V. parle de l’opposition et de son chef, le banquier Eduardo Montealegre, qui a agglutiné autour de lui tous les partisans du libéralisme et qui a eu jusqu’à l’appui des ex-sandinistes lors des élections municipales de 2008. Mais elle nous dit qu’à présent il ne peut plus compter sur l’appui de la grande majorité des opposants puisque « sa visite à Roberto Micheletti au Honduras (Roberto Micheletti a pris la tête du putsch qui a renversé le président légitime de ce pays), en plus d’être erreur inutile, a montré son vrai profil politique».

Elle parle d’une erreur de la part d’Eduardo Montealegre, seulement d’une erreur, mais pour celui qui ne le saurait pas, il faut rappeler qu’il a été un membre des plus importants des trois gouvernements précédents qui ont mené le pays à la ruine totale et qui durant 17 ans ont privatisé tous les droits du peuple. Il doit encore être jugé pour le vol de plus de 500 millions de dollars dans les caisses de l’Etat à l’époque où il était ministre des finances du président Aleman. Ceci lui a permis de devenir l’un des plus grands millionnaires du pays. Il est le représentant des banquiers, de l’extrême droite blanche et raciste, putschiste et dictatoriale. C’est l’homme que les ex-sandinistes ont appuyé et ils paraissent seulement ne s’en être rendu compte qu’au moment où il a manifesté son appui à Roberto Micheletti

M.L.V. prévoit aussi que le FSLN se fractionne et que Daniel Ortega soit isolé. Bien sûr, certains au sein du FSLN regrettent que le travail du gouvernement soit si centré sur la personne de Daniel Ortega, mais tous reconnaissent que celui-ci est au sommet de sa popularité, tant à l’intérieur du FSLN que dans une large majorité de la population. Pour les gens les plus à la base du sandinisme, il est intouchable. Car, même s’il voyage en hélicoptère ou en Mercedes, il n’hésite pas à se mettre les pieds dans la boue et à s’imprégner des problèmes des gens. D’autres, voyageant aussi dans de luxueux 4x4 représentants de la société civile et des ONG, il y a longtemps qu’ils ne connaissent la réalité du pays que par les rapports que leur rédigent leurs techniciens. Jamais, ils n’ont écouté les problèmes des gens.

M.L.V. met également en doute la poursuite des programmes « Usura Cero » et « Hambre Cero » Or parmi les programmes sociaux, celui de « Hambre Cero » est garanti par les 20 millions de $US attribués par la Banque Interaméricaine de Développement et il bénéficiera à 11 000 familles paysannes de Matagalpa, Jinotega et de la Côte Atlantique. La Communauté Internationale l’a approuvé et a décidé de le financer

La production au Nicaragua a augmenté malgré les problèmes (crise mondiale) en comparaison avec d’autres nations. Selon Orlando Nuñez, assesseur de Daniel Ortega pour les thèmes sociaux, le Nicaragua est autosuffisant dans la majorité des produits alimentaires de base sauf pour le riz. Grâce aux crédits attribués aux grands, moyens et petits producteurs, ainsi qu’aux coopératives, l’autosuffisance complète pourra être atteinte en 2011.

Elle critique le fait que les fonds de l’ALBA ne soient pas inclus dans le budget de la République, mais grâce à cela ils ne restent pas dans les grandes institutions étatiques, comme l’Assemblée Nationale, les pouvoirs judiciaires et électoraux, mais ils arrivent là où ils doivent arriver, c’est-à-dire aux gens. Et ils sont gérés par les coopératives et par les Conseils du Pouvoir Citoyen (CPC). Pendant ce temps, il faut savoir que 300 millions de dollars arrivent au Nicaragua sans passer par le budget de la République et sont gérés par des ONG. Personne n’a envisagé qu’il en soit autrement. Or, s’il est vrai que beaucoup de personnes de la société civile font un bon travail, il y en a aussi qui vivent depuis de nombreuses années aux dépens de fonds destinés normalement au peuple.

Pour finir, elle parle du « contrôle politique qui inclut aussi la répression » en se fondant sur les appréciations du Centre nicaraguayen des Droits Humains (CENIDH) alors que ce dernier a perdu l’objectivité qu’on est en droit d’attendre d’un organisme de défense des droits humains et qu’il semble davantage motivé par le ressentiment. Ainsi, M.L.V. nous dit qu’ « en l’absence d’appareils répressifs institutionnalisés, le gouvernement utilise des forces de choc organisées qu’il a sous la main. Et ce qu’il a sous la main, ce sont les employés de l’Etat inconditionnels et les groupes de jeunes facilement manipulables et capables de s’armer de pierres et de bâtons pour importuner ou attaquer ceux qui ne pensent pas comme eux. Parmi ces jeunes se trouvent les « pandilleros » (délinquants) des quartiers marginalisés».

Or, ce que nous savons c’est que jusqu’à aujourd’hui, il n’y a aucun prisonnier politique au Nicaragua, ni fermeture de médias, ni de morts du fait de soi-disant groupes paramilitaires. (un jeune sandiniste de Jinotega est mort le 21 novembre au retour d’une manifestation du FSLN, suite à une agression par des opposants. Le CENIDH n’a pas fait d’investigation !) La police n’a réprimé aucune manifestation de l’opposition comme l’ont fait les gouvernements néolibéraux.

Ce gouvernement a des contradictions et, bien entendu, n’est pas parfait. Et il ne pourra pas résoudre ses contradictions tant qu’il n’aura pas réuni une majorité sociale lui permettant de changer le système économique capitaliste. Mais il ne fait aucun doute que ce gouvernement a mis les intérêts des gens au centre de ses politiques, qu’il se bat pour mettre en pratique le projet sandiniste pour lequel des milliers de Nicaraguayens sont morts et qu’il est sans aucun doute le meilleur gouvernement que le Nicaragua ait connu depuis 1990.

Les Etats-unis investissent des millions dans l’opposition aux sandinistes Jorge Capelan, Tortilla con Sal, le 4 août 2010

En 2009, le « Fondo Nacional para la democracia « (NED) a affecté un total de 623 180 dollars à 9 groupes de la « société civile» opposés au gouvernement sandiniste. C’est un peu plus qu’en 2008 mais c’est presque le double qu’en 2007. Cette organisation dépend du département d’Etat et elle est financé presque en totalité par les fonds du gouvernement des Etats-Unis pour promouvoir des mouvements en accord avec leur politique. Les principaux bénéficiaires sont le CIPE (center for internacional Private Enterprise) en lien avec le COSEP (organe patronal nicaraguayen), l’Institut Nicaraguayen d’Etudes Humanistes et le groupe politique « Movimiento por Nicaragua » MpN. Etc, etc.

Selon la chercheuse Eva Golinger, la NED a destiné en 2009 6,4 millions de dollars à des groupes d’opposition dans les pays faisant partie de l’ALBA (Alternative Bolivarienne pour les Amériques) : Venezuela : 1,8 millions de dollars, soit plus du double qu’en 2008, Cuba : plus de 1,5 millions de dollars Bolivie : 1,36 millions de dollars Equateur 1,1 millions de dollars et le Nicaragua avec plus de 600 000 dollars.

Quelques résultats obtenus par le gouvernement sandiniste par Manuel Moncada Fonseca

De janvier 2007 à ce jour, les exportations sont passées de 1.050 à 1.202 millions de dollars et les réserves internationales nettes de 859 à 1.019 millions de dollars La dette externe a baissé de 4.527 à 3.385 millions de dollars Le lendemain de sa prise de pouvoir, Daniel Ortega a décrété la gratuité des services de santé publique et de l’éducation publique primaire et secondaire. La crise énergétique est résolue. Les coupures de courant de plus de 12 heures font partie du passé néolibéral. Les salaires de l’Exécutif ont baissé de 7.000 $ à 3.000 $. Nicaragua s’est intégré à l’Alternative Bolivarienne pour les Amériques (ALBA) et à Petrocaribe-ALBA, s’assurant ainsi, entre autres choses, de la livraison de10 millions de barils de pétrole par an. Plus de 35.000 Nicaraguayens ont bénéficié de la mission MILAGRO (opération des yeux) Le nombre de syndicats a doublé. Les affiliés à la Sécurité Sociale sont passés de 440.000 à 490.000. Le programme « Hambre Cero » et le « Bono productivo alimentario » de 1.500 $ pour chaque femme a bénéficié à plus de 30 000 familles. 1.000 postes de distribution de grains de base ont été ouverts pour lutter contre la faim et l’inflation spéculative. Le crédit agricole a été triplé et bénéficie surtout aux petits et moyens producteurs. Des semences améliorées ont été distribuées à plus de 200.000 producteurs. Malgré la crise internationale, le Nicaragua a augmenté ses marchés avec le Venezuela, la Russie et la Chine.

Et la liste des résultats positifs est loin d’être exhaustive. Nous pourrions citer : L’amélioration de l’infrastructure routière, L’attribution de maisons ou le programme « techo » (toits), La législation du travail des mineurs qui interdit de les employer pour des travaux physiquement ou psychologiquement dangereux, Le programme « Amor » pour intégrer les enfants des rues, pour faire adopter des enfants des orphelinats et autres institutions ou pour trouver des familles d’accueil, Les programmes d’alphabétisation pour adultes, La fin du déminage des régions infestées par les mines antipersonnel.